En Afrique, la température moyenne de 2024 a dépassé d’environ 0,86 °C celle de la période 1991-2020. Selon les données du dernier rapport de l’Organisation mondiale de la météorologie (OMM), l’année 2024 se classe ainsi à la première ou la deuxième place des années les plus chaudes observées depuis le début des relevés systématiques en 1900. La dernière décennie, conclut l’organisme, est la plus chaude jamais enregistrée.
D’après Celeste Saulo, Secrétaire générale de l’OMM, le dernier rapport sur l’état du climat en Afrique révèle l’ampleur et l’intensification des incidences des changements climatiques sur le continent. Il illustre, ajoute-t-elle, également la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes, qui exposent certains pays à des crues sans précédent, causées par des précipitations excessives, tandis que d’autres sont aux prises avec une sécheresse persistante et une pénurie d’eau.
En effet, en 2024, dans le continent, la température moyenne de l’air près de la surface a été la plus chaude ou la deuxième plus chaude jamais enregistrée depuis 1900. Selon les données du rapport, la valeur moyenne de la température a dépassé de quelque 0,86 °C la moyenne de 1991-2020 comprise entre 0,60 °C et 1,05 °C, selon les cas. Par rapport aux valeurs de référence de 1961-1990, l’anomalie moyenne est de 1,53 °C soit, entre 1,35 °C et 1,63 °C, selon l’ensemble de données utilisé.
Les régions ont été différemment touchées. Plusieurs pays d’Afrique australe par exemple ont connu des conditions de sécheresse sévère qui ont eu un impact dévastateur sur l’agriculture et entraîné une importante insécurité alimentaire. A cela, s’ajoute la survenance des tempêtes tropicales telle que Filipo qui, dans certains pays, a causé des décès et des déplacements de population. Le cyclone tropical Hidaya quant à lui, a provoqué de fortes précipitations et des vents violents. Ces tempêtes ont provoqué de fortes précipitations et des vents violents dans d’autres pays, entraînant des crues, des tornades et des dégâts considérables aux infrastructures, de nombreuses victimes et causé le déplacement de milliers de personnes.
En Afrique de l’Est, des pluies d’une force et d’une durée rares, les glissements de terrains dévastateurs et la survenance des vagues de chaleurs extrêmes ont provoqué des incidences majeures dans plusieurs pays de la région. Suite à ces catastrophes par exemple, plusieurs centaines de décès ont été recensés et des milliers de personnes sinistrées dans l’ensemble de la région ont été identifiées. Selon les experts de l’OMM, même si certaines cartes indiquent que les précipitations moyennes en Afrique de l’Est d’octobre à décembre étaient proches de la normale, elles ont été insuffisantes pour assurer les cultures vivrières et les moyens de subsistance dans de nombreuses régions. La situation alimentaire est par ailleurs devenue inquiétante entre la fin de 2024 et le début de 2025 dans de nombreux pays, compromettant les moyens de subsistance des familles et entraînant ainsi une pénurie alimentaire et l’accès des enfants à l’enseignement.
En Afrique centrale, le même scénario s’est produit. En effet, à la suite de fortes précipitations, plusieurs pays de la région ont connu de graves crues, qui ont provoqué des dégâts de grande ampleur et le déplacement d’une importante partie de la population dans la région. C’est le cas du Cameroun, du Tchad et de la RCA et de la République démocratique du Congo (RDC). Ce malheureux épisode a entraîné d’importants dégâts et des déplacements de population de part et d’autres des pays.
En Afrique de l’Ouest, des pluies torrentielles, les crues et des vagues de chaleurs sans précédent ont eu de graves incidences dans plusieurs pays, occasionnant là-bas aussi des décès, des déplacements massifs des populations et des pertes humaines. Ces incidences, soulignent le rapport de l’état du climat du continent en 2024, illustrent la vulnérabilité croissante du Sahel face à la hausse des températures. « Les phénomènes météorologiques extrêmes touchent les enfants de plein fouet et peuvent considérablement perturber leur parcours scolaire », souligne le rapport. Selon un rapport du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), au moins 242 millions d’enfants dans le monde ont manqué l’école à cause de ce type de phénomènes en 2024, dont un nombre important en Afrique subsaharienne.
L’Afrique du Nord pour sa part, a subi plusieurs phénomènes météorologiques et climatiques particulièrement violents. Comme dans les autres régions du continent, ces phénomènes sont sensiblement les mêmes et se caractérisent par de fortes pluies ayant entraîné de graves inondations dans des pays comme le Maroc, occasionnant d’importants dégâts. Des routes, des puits et des infrastructures telles que le réseau d’alimentation électrique ont notamment été détruits. En septembre/octobre, le Sahara a connu ses premières crues importantes depuis un demi-siècle. Plusieurs pays d’Afrique du Nord, dont l’Égypte et l’Algérie, ont connu des épisodes de chaleur extrême, qui sont devenus un phénomène courant dans la région.
Alors que l’on croyait le continent à l’abri des phénomènes extrêmes liés aux changements climatiques, ces événements font ressortir la vulnérabilité croissante des pays africains face aux catastrophes d’origine climatique, de même que le besoin urgent d’appliquer des stratégies d’adaptation et des mesures de renforcement de la résilience sur tout le continent. Depuis la signature de l’Accord de Paris sur le climat de 2015, les pays plaident pour une compensation climatique à la hauteur des conséquences causées par les plus grands pollueurs de la planète, mais les pays développés font le dos rond. Or, dans les faits, le continent n’est responsable qu’à hauteur de 4% des émissions de gaz à effet de serre (GES). Ce rapport témoigne de la nécessité d’agir, notamment par une prise de responsabilité de part et d’autre, car sans cette option ces phénomènes devraient s’aggraver.
Michael Moukouangui Moukala avec l’OMM