Au Gabon, une mission d’inspection sanitaire et d’hygiène effectuée dans le 5e arrondissement de la commune de Libreville, par l’Agence Gabonaise de Sécurité Alimentaire (AGASA) afin de lutter contre la commercialisation des denrées alimentaires impropres à la consommation, relance le débat sur le respect des normes d’hygiènes des petites structures de restauration au Gabon. Entre insalubrité notoire et empoisonnement, la santé des consommateurs tient sur un fil de la passivité de l’agence.
Pour mettre en pratique son inspection, c’est à Lalala, dans le 5e arrondissement de la commune de Libreville, que les équipes de l’AGASA ont posé leur valise. Si de nombreuses structures ont été passées au peigne fin, trois d’entre elles ont présenté des graves non-conformités. Entre autres : le manque d’hygiène flagrant, caractérisé par un environnement insalubre, l’absence d’équipements de protection individuelle (EPI) pour le personnel, le défaut de certificats médicaux attestant de l’aptitude du personnel à manipuler des denrées alimentaires, des conditions de préparation des aliments inadéquates, présentant un risque élevé de contamination.
Face à ce constat, les établissements concernés ont été immédiatement fermés, note l’AGASA sur sa page Facebook. « Les responsables de ces établissements devront répondre de leurs manquements devant les autorités compétentes, pour mise en danger de la santé publique », ajoute la même.
Si les fermetures sont saluées, nombreux sont les consommateurs (internautes) qui doutent de l’efficacité de l’action de l’AGASA sur le moyen et long terme. Sur la page Facebook de l’agence, les réactions sont dispersées entre ceux qui doutent de l’efficacité de cette sortie et la supposée corruption qui gangrènerait l’agence. Ces prises de position traduisent le peu de confiance des consommateurs gabonais à l’endroit de l’AGASA, alors que la sanction financière, seule, ne suffit plus à protéger durablement les consommateurs. La gravité des faits d’insalubrité et d’insécurité alimentaire constatés dans ces structures révèle surtout l’inefficacité chronique du déploiement de l’AGASA. L’agence intervient toujours trop tard, une fois que les risques sont déjà avérés et que des centaines de consommateurs ont potentiellement été exposés.
La question n’est donc plus de savoir si l’AGASA est capable de sanctionner, mais si elle est réellement en mesure de prévenir. Où sont les inspections régulières, les contrôles systématiques et la transparence sur les résultats ? Pourquoi la tolérance zéro ne s’applique-t-elle qu’après des scandales ponctuels, au lieu d’imposer une discipline permanente ?
Cette inaction, ou cette action trop sporadique, fragilise la confiance du public vis-à-vis de cette entité étatique alors que depuis sa prise de fonction, le ministre de l’Agriculture, de l’Élevage et du développement rural, Odette Polo épouse Pandzou invite l’AGASA a être plus présente sur le terrain. « Je vais attirer votre attention pour dire qu’il faut prendre à cœur votre mission de contrôle », s’adressait en mai dernier le ministre, lors de la célébration de la journée mondiale de la santé des végétaux.
Comme le rappellent de nombreux consommateurs, il ne suffit pas de dresser des procès-verbaux, ni de coller des scellés pour endiguer un phénomène devenu structurel. Puisque trop souvent, lorsque l’AGASA sort de ses bureaux feutreux du bord de mer, les images qu’elle soumet à la lecture racontent les mêmes histoires. Celles selon lesquelles, les gabonais sont empoissonnés dans par la nourriture qu’ils consomment dehors au quotidien. Tant que l’AGASA se contentera de coups d’éclat médiatiques, la restauration informelle continuera d’opérer en toute impunité, mettant en danger la santé de milliers de Gabonais.
Wilfried Mba Nguema